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Quand le cinéma se met hors champ

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Quand le cinéma se met hors champ

« L’esprit critique » s’intéresse à trois films qui nous proposent de décaler le regard en pointant la caméra sur ce qui reste souvent hors champ ou en marquant un écart avec les événements dont ils s’emparent. Le premier, La Zone d’intérêt, de Jonathan Glazer, laisse Auschwitz en contrechamp sonore pour se focaliser sur la vie de famille du chef du camp d’extermination. Le second, Priscilla, de Sofia Coppola, cherche à détourner le biopic de la star Elvis Presley pour braquer les projecteurs sur sa compagne. Le dernier, May December, de Todd Haynes, se situe vingt ans après un scandale lorsqu’une actrice hollywoodienne part à la rencontre des protagonistes dans le but d’en faire une fiction.

« La Zone d’intérêt »

La Zone d’intérêt est le film qui fait débat en ce moment et remplit les salles dans une période relativement morose en la matière, après un retour progressif des spectateurs et spectatrices en salles pendant l’année 2023.

Le réalisateur britannique Jonathan Glazer, auteur notamment d’Under the Skin, adapte librement l’ouvrage éponyme du romancier Martin Amis. Le film, qui a reçu le Grand Prix du jury au dernier Festival de Cannes, se situe à Auschwitz, non pas à l’intérieur du camp d’extermination mais à proximité immédiate, dans un pavillon avec jardin et piscine, où se déroule la vie bien réglée du commandant du camp, Rudolf Höss, incarné par Christian Friedel, et de sa femme, jouée à l’écran par Sandra Hüller.

Allégorie puissante ou esthétisation problématique : la réception du film a été fracturée, comme souvent lorsqu’il s’agit de faire un film au sujet d’Auschwitz. 

La Zone d’intérêt, de Jonathan Glazer est en salles depuis le 31 janvier dernier.

« Priscilla »

Priscilla est le dernier film en date de la réalisatrice Sofia Coppola. Il raconte l’histoire d’une adolescente, Priscilla, qui vit sur une base militaire allemande de l’US Air Force où son père est affecté. Alors qu’elle s’ennuie, elle rencontre Elvis Presley, lui aussi militaire, de dix ans son aîné.

La jeune fille devient l’épouse du célèbre chanteur, s’imaginant une vie soyeuse et festive. Mais, en réalité, elle est tenue à distance, réduite à attendre la star à la maison en lisant des magazines dont beaucoup décrivent les liaisons de son célèbre mari avec telle ou telle starlette ou actrice.

Variation sur l’adolescence, qui constitue une obsession du cinéma de Sofia Coppola après Virgin SuicidesLost in Translation, Marie-Antoinette, Somewhere, The Bling Ring ou encore Les Proies, le film reconstitue fidèlement la société de consommation, le rock’n’roll, la drogue, en se fondant sur les mémoires de Priscilla Presley, intitulés Elvis et moi, parus aux États-Unis en 1985.

« May December »

May December est une expression qui désigne en anglais une relation où les deux partenaires ont une grande différence d’âge. C’est aussi le titre du nouveau film de Todd Haynes qui aborde précisément une situation de ce type en mettant de nouveau en scène son actrice fétiche, Julianne Moore.

Celle-ci a été prise dans un scandale après avoir été surprise dans la réserve de l’animalerie où elle travaillait ayant une relation sexuelle avec un garçon de 13 ans. Elle a ensuite purgé une peine de prison, épousé le jeune garçon puis eu trois enfants avec lui.

Le réalisateur, remarqué notamment par les films Carol ou Dark Waters, capte cette histoire à distance, vingt ans après, lorsqu’une star hollywoodienne incarnée par Natalie Portman a convaincu les protagonistes d’accepter de passer du temps avec elle dans l’optique de préparer une fiction sur leur histoire.  

May December, de Todd Haynes, est sorti en salles le 24 janvier dernier.

Avec :

  • Alice Leroy, qui écrit pour les Cahiers du cinéma 
  • Occitane Lacurie, membre du comité de rédaction de la revue de cinéma Débordements, doctorante en esthétique et études visuelles ;
  • Raphaël Nieuwjaer, qui écrit pour les Cahiers du cinéma et aussi pour Études.

« L’esprit critique » est un podcast réalisé par Samuel Hirsch et enregistré dans les studios de Gong par Karen Beun.

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